Vie Parisienne (La)
La Vie ParisienneJacques Offenbach En bref :Opéra Bouffe en 5 actes de Henri Meilhac et Ludovic Halévy. Dans notre revue :– Numéro 37
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La Vie Parisienne :
1866. Paris est plus que jamais la ville des plaisirs. La capitale prépare l’exposition de 1867 et s’apprête à accueillir des » flottes de nababs » (Daudet). Jacques Offenbach est au sommet de sa gloire. Il vient de remporter, avec ses complices habituels, Meilhac et Halévy, deux triomphes sur la scène des Variétés avec La Belle Hélène et Barbe-Bleue. Le trio prépare La Grande Duchesse de Gérolstein en vue, justement, de l’exposition. Et de refuser les demandes alléchantes de directeurs qui cherchent comment divertir les nombreux visiteurs attendus…
Plunkett, le directeur du théâtre du Palais Royal a l’idée de produire une sorte de vaudeville à couplets, selon la tradition de la maison, qui serait une caricature de la société parisienne. Le titre est même trouvé. Ce sera La Vie Parisienne. Il soumet son projet à Offenbach et ses auteurs habituels : les trois hommes sont enthousiasmés.
Une ombre au tableau : l’ouvrage devra être interprété par les comédiens habituels du théâtre, qui ne sont guère préparés à chanter une véritable partition : » Si mesdemoiselles Honorine, Paurelle et Montaland, charmantes étoiles de la troupe, sont capables d’interpréter des couplets pas trop difficiles, on ne peut en dire autant de Jules Brasseur (l’ancêtre de tous les Brasseurs » à la voix graillonneuse, de l’irrésistible Hyacinthe au timbre… détimbré ou de Gil Pérès, jeune premier, dont le filet vocal passe timidement la rampe ! » (1)
Offenbach réussit tout de même à faire engager Zulma Bouffar pour qui il pourra écrire le rôle de Gabrielle sans contraintes. Au cours des répétitions, les comédiens du théâtre prennent peur et finissent par créer un climat d’inquiétude. Comme d’habitude, seul Offenbach reste confiant et il a raison : la première, le 31 octobre 1866, est triomphale…
Dans ses ouvrages précédents, Orphée aux Enfers et La Belle Hélène, Offenbach et ses auteurs se moquaient déjà de la société du Second Empire. Mais le choix de l’Antiquité comme toile de fond de l’action émoussait un peu les critiques. Dans La Vie Parisienne, par contre, les personnages sont contemporains, la caricature est sans complaisance. » Le livret écrit par Meilhac et Halévy est une remarquable photographie du Paris de 1866 » écrit Jean-Claude Yon dans son » Jacques Offenbach » (2)
À la création, l’ouvrage comportait 5 actes. En 1873, les auteurs présentèrent, aux Variétés, une version en 4 actes.
La Vie Parisienne se joue pour la première série 265 fois consécutives (très gros succès pour l’époque). Elle conquiert la province et le monde entier. Elle sera toujours à l’affiche lors de l’ouverture de l’Exposition Universelle qui ouvre ses portes le 1er avril 1867. La première représentation de La Grande Duchesse de Gérolstein a lieu le 12 avril 1867. Après quelques aménagements, la pièce connaît elle aussi un véritable triomphe. Mais ceci est une autre histoire…
Après Paris, La Vie Parisienne conquiert la province, Vienne, Berlin, et bientôt le monde entier.
La Vie Parisienne est sans doute l’ouvrage d’Offenbach qui a totalisé le plus de représentations. Parmi les reprises parisiennes, on, citera :
Quatre reprises au théâtre des Variétés (1892, 1896, 1904, 1911) avec des interprètes qui avaient pour nom, Mlle Méaly, Germaine Gallois, Albert Brasseur, Baron, Eve Lavallière, Anna Tariol-Baugé et même Mistinguett (1911)
L’ouvrage est donné à Mogador en 1931 avec Jane Marnac, Danièle Brégis, Rose Carday, Jeanne Saint-Bonnet, Max Dearly, Félix Oudart, Henri Laverne, Dréan.
La version donnée au Palais-Royal par la compagnie Renaud-Barrault en 1958 a fait date dans l’histoire de l’opérette. La mise en scène de Jean-Louis Barrault, l’excellence des comédiens-chanteurs (Simone Valère), Suzy Delair (comme Zulma Bouffar à la création, la seule chanteuse lyrique) , Madeleine Renaud, Pierre Bertin, Jean-Pierre Granval, Jean Desailly, Jean Parédès, Georges Aminel ont fait du spectacle un triomphe et ont sans doute contribué au » retour en grâce » d’Offenbach qui, depuis un certain temps, était délaissé par les scènes françaises.
On citera encore à Paris la version de Jean Marsan et Raymond Vogel à l’Opéra Comique (1974) avec Nicole Broissin, Danièle Millet, Christiane Harbell, Madeleine Vernon, Michel Caron, Henri Gui, Jacques Mareuil, Jean-Marc Recchia, Luc Barney ; celle donnée en 1981 pour la réouverture du Châtelet, en 1985 au théâtre de Paris, en 1990 salle Favart, en 1997 au Palais Omnisport de Bercy et à la Comédie Française (version de Daniel Mesguich qui fut l’objet de controverses), en 2002 à l’Opéra-Comique, mise en scène de Jérôme Savary (3).
1 – Guy Lafarge dans » Opérette » n° 37
2 – Editions Gallimard
3 – Les versions données à Paris à partir de 1980 font l’objet d’articles complets dans la revue » Opérette «
L’ARGUMENT :
version de 1873
Acte I : La gare du Chemin de fer de l’Ouest
Deux gandins, Raoul de Gardefeu et Bobinet se sont brouillés pour la grisette Blanche Taupier. Aujourd’hui, ils attendent chacun de leur côté Métella, une demi-mondaine qui revient de Trouville. La jeune femme se présente au bras d’un troisième amant et feint de ne pas connaître ses deux soupirants. Que faire ? Raoul et Bobinet se réconcilient et décident de se remettre à fréquenter les femmes du monde. Resté seul, Gardefeu reconnaît son ancien domestique devenu guide du Grand Hôtel. Ce dernier attend un couple de suédois qui vient découvrir la « Vie Parisienne ». Moyennant une honnête rétribution, le guide accepte de céder sa place à Raoul, qui accueille donc le baron de Gondremark et Madame. Que cette baronne est jolie ! , c’est sans aucun doute une, femme du monde. Raoul entraîne le couple à son domicile promu pour l’occasion « Grand Hôtel ». L’acte se termine avec l’arrivée d’un riche Brésilien, bien décidé à se ruiner joyeusement en profitant au maximum lui aussi de « La Vie Parisienne.
Acte II : Un salon chez Gardefeu
Raoul convainc ses hôtes qu’ils sont dans une annexe du Grand Hôtel. Resté seul avec son guide, le baron lui demande de le mettre en relation avec une certaine Métella, auprès de laquelle il est recommandé. Gardefeu accuse le coup, mais promet de lui faire rencontrer la drôlesse. Justement Métella se présente. Elle fait la connaissance de la baronne, puis de son époux auquel elle promet un prochain rendez-vous. Elle se retire en jurant de se venger de Raoul.
Avec la complicité de Bobinet, Raoul envisage de faire inviter Gondremark à une soirée à laquelle la baronne ne sera pas conviée. Ce qui lui donnera le champ libre pour lui faire un brin de cour. En attendant, le baron, ayant exigé de souper à la table d’hôte, Raoul invite en catastrophe ses voisins dont la gantière Gabrielle, serrée de près par Frick le bottier. Tous ces convives animent une soirée des plus farfelues.
Acte III : Le grand salon de l’hôtel de Quimper-Karadec
Le baron est donc invité à une soirée dans une demeure que Bobinet, déguisé en amiral suisse, a « empruntée » à sa tante actuellement absente de Paris. Qui sont les invités ? Pauline, la femme de chambre et tous les domestiques auxquels se joint Gabrielle, la gantière. A son arrivée, Gondremark est un peu surpris par l’allure des invités. Mais il est vite subjugué par Madame l’Amiral, alias Pauline. La soirée se poursuit dans une fantaisie échevelée, pour se terminer par un cancan endiablé.
Acte IV : Un salon au Café Anglais du Boulevard des Italiens
Le baron est furieux de la supercherie dont il a été l’objet. Pour l’heure, il a un rendez-vous avec Métella qui se présente suivie d’une femme masquée. Au même moment arrive une bande joyeuse emmenée par notre Brésilien du 1° acte, accompagné par Gabrielle, sa dernière conquête. Voici enfin Gardefeu et Bobinet. C’est l’instant des explications. Admettant qu’il s’est bien amusé, et reconnaissant sa femme dans la dame masquée, Gondremark passe l’éponge. Métella s’approche de Gardefeu. Bobinet s’approche de Métella. Les deux gandins sont à nouveau pris au piège de la rouée ! Toute la compagnie s’en va souper en célébrant « La Vie Parisienne ».
Le quatrième acte initial, à nouveau situé chez Gardefeu et supprimé pour la reprise de 1873, est parfois repris dans certaines productions. Gardefeu accueille la Baronne à son retour de l’Opéra mais l’intervention de la tante de Bobinet, Mme de Quimper-Karadec, ruine ses espoirs de conquête. Cet acte est aussi parfois résumé à une scène devant le rideau entre la baronne et Métella qui se fait connaître de la baronne et lui apprend la duplicité de Raoul.
Les représentations de Bruniquel (2013) restituent un quatrième acte complet mais qui avait été remplacé, la veille de la création de 1866, par le quatrième acte résumé ci-dessus. (voir Opérette-Théâtre musical n° 169).
LA PARTITION :
version 1873
Ouverture
Acte 1
Chœur d’entrée » Nous sommes employés de la ligne de l’Ouest » ; Chœur « Le ciel est noir » et entrée de Métella » Attendez d’abord que je place » ; Couplets » Elles sont tristes les marquises » (Bobinet, Gardefeu) ; Triolet » Ce que c’est pourtant que la vie » (Gardefeu) ; Trio » Jamais foi de cicérone » (Gardefeu, le baron, la baronne) ; Final : Chœur « A Paris, nous arrivons en masse », Rondo « Je suis Brésilien, j’ai de l’or » (Le Brésilien) et Final « Paris ! Paris ! Paris ! (tous).
Acte 2
Entr’acte ; Duo de la gantière et du bottier « Entrez ! entrez jeune fille à l’oeil bleu » (Frick, Gabrielle) ; Couplets » Dans cette ville toute pleine… Je veux m’en fourrer jusque-là » (le baron) ; Rondeau de la lettre » Vous souvient-il, ma belle » (Métella) ; Couplets du major « Pour découper adroitement » (Frick) ; Final : Chœur « Nous entrons dans cette demeure », Couplets » Je suis veuve d’un colonel (Gabrielle), Tyrolienne « On est v’nu m’inviter (Gabrielle, tous).
Acte 3
Entr’acte ; Chœur « Il faut nous dépêcher vite » ; Septuor » Donc, je puis me fier à vous » (Bobinet, Pauline, Prosper, Urbain, les autres domesqtiques) ; Duetto » L’amour, c’est une échelle immense » (Pauline, le baron) ; Couplets de la Parisienne « On va courir, on va sortir » (Gabrielle, tous) ; Ensemble » Votre habit a craqué dans le dos » (le baron, Bobinet, Pauline, Gabrielle, tous) ; Final : Ensemble « Soupons, soupons, c’est le moment » (tous), Valse « Quand on boit, il est une chose » (Gabrielle) Final « Feu partout » (le baron, tous).
Acte 4
Entr’acte ; Chœur » Proprets, coquets et discrets » » ; Couplets » Avant toute chose… Fermons les yeux » (Alfred, les garçons) ; Rondeau » C’est ici l’endroit redouté des mères » (Métella) ; Chœur « En avant, les jeunes femmes ! », et Duo « Hier à midi la gantière » (Gabrielle, le Brésilien) ; Final « Par nos chansons et par nos cris célébrons Paris » (tous).
FICHE TECHNIQUE :
La Vie Parisienne
Opéra bouffe en 5 actes de Henri Meilhac et Ludovic Halévy, musique de Jacques Offenbach. Création à Paris, théâtre du Palais-Royal, le 31 octobre 1866 avec :
Zulma Bouffar (Gabrielle), Honorine (Métella), Céline Montaland (la baronne), Paurelle (Pauline), Jules Brasseur (le Brésilien, Frick, Prosper), Gil Pérès (Bobinet), Hyacinthe (le baron), Priston (Gardefeu), Lassouche (Urbain), Martal (Joseph).
Version en 4 actes, au Théâtre des Variétés, le 25 septembre 1873. avec :
Zulma Bouffar (Gabrielle), Mlle Devéria puis Céline van Ghell (Metella), Juliette Granville (la baronne), Mlle Berthal (Pauline), José Dupuis (le baron), Jean Berthelier (le Brésilien, Frick, Prospère), Cooper (Gardefeu), Eugène Grenier (Bobinet), Baron (Urbain), Léonce (Alfred).
Editions Chappell
DISCOGRAPHIE :
Intégrales
Mady Mesplé, Régine Crespin, Christiane Chateau, Michel Sénéchal, Luis Masson, Jean-Christophe Benoît. Orch. Michel Plasson (1976)
EMI C 165 14123/4 (2 disques)
Danielle Chlostawa, Renée Auphan, Danièle Millet, Michel Roux, Patrick Minard, Jacques Taylès. Orch. Laurent (version Châtelet 1980)
Polydor 26 76 904 (Intégrale partition sans texte) (2 disques)
Nicole Broissin, Danièle Millet, Christiane Harbell, Lue Barney, Jacques Mareuil, Michel Caron. Orch. François Rauber (version Opéra Comique 1974)
Carrère 67 769 (2 disques)
Willy Clément, Paul Ville, Aimé Doniat, René Lenoty, André Balbon, Genio, Alain Pruvost, Nadine Renaux, Madeleine Drouot, Claudine Collart, Germaine Parat, Jeannette Levasseur, Huguette Prudhon, Jacqueline Dardignac . Orch. Jules Gressier
RTF 1954 (INA-AUDIO)
Sélections
Simone Valère, Suzy Delair, Madeleine Renaud, Jean Desailly, Pierre Bertin, Jean-Louis Barrault. Orch. André Girard (version Cie Renaud-Barrault 1958)
Musidisc 30 CV 11239 (repris en CD Musidisc 206142)
Lina Dachary, Nadine Renaux, Deva Dassy, Michel Roux, Michel Hamel. Orch. Jules Gressier
EMI C 057 10851(repris en CD Emi/ EPM 767 515)
Renée Doria, Andrée Gabriel, Lucien Huberty, Dario Moréno, Julien Giovannetti. Orch. Marcel Cariven
Philips 6747 183 (Album 2 disques) (Au verso : La Belle Hélène)( repris en CD Philips)
Mady Mesplé, Régine Crespin, Christiane Chateau, Michel Sénéchal, Luis Masson, Jean-Christophe Benoit. Orch. Michel Plasson
Sélection du Reader’s Digest CD 3159.4 (extraits intégrale EMI) (3 CD) (+ La Belle Hélène + Orphée aux enfers)
DVD
– Intégrale : Simone Valère, Micheline Dax, Geneviève Kervine, Jean-Pierre Granval, Jean Dessailly, Pierre Bertin, Jean Parédès. Och. ORTF, dir. André Girard,
Archives de l’INA, Film 1967 (1DVD Editions Montparnasse )
– Intégrale : Hélène Delavault, Claire Wauthion, Isabelle Mazin, Jean-Yves Chatelais, Jean-François Sivadier, Jacques Verzier. Orch. Alain Françon
Opéra National de Lyon – Mise en scène : Jean-Yves Ossonce
Arthaus-Opéra de Lyon (1 DVD) [disponible à l’Opéra de Lyon
– Intégrale : Emmanuelle Zoldan, Aurélie Fargues, Inge Dresig, Frank’T’Hézan, Michel Vaissière; Frédéric Mazotta, Jean-Louis Meunier, dir. Jean-Christophe Keck
Mise en scène : Frank T’Hézan. Festival de Châteaux de Bruniquel 2007 (version en 5 actes avec un 4e acte inédit)
(2 DVD) – Consulter le site www.bruniqueloff.com